Le 12 février 1915 s’éteignait Émile Waldteufel, l’un des plus brillants compositeurs de musique de danse du XIXe siècle. Ce Strasbourgeois d’origine, surnommé le « Strauss français », a marqué son époque avec des valses envoûtantes et raffinées, dont certaines résonnent encore aujourd’hui dans les salles de concert et les salons de danse. À l’occasion du 110e anniversaire de sa disparition, revenons sur la vie et l’œuvre de cet artiste qui a fait briller la musique française sur la scène internationale.
Une enfance bercée par la musique
Né à Strasbourg le 9 décembre 1837, Émile Waldteufel appartient à une famille de musiciens. Son père, Louis Waldteufel, dirige un orchestre réputé et sa mère est pianiste. Dès son plus jeune âge, il baigne dans un environnement musical foisonnant et se familiarise avec le piano et la composition. Après l’annexion de l’Alsace par l’Empire allemand en 1871, la famille Waldteufel, attachée à la France, s’installe définitivement à Paris.
C’est dans la capitale française qu’Émile perfectionne son art, étudiant au Conservatoire de Paris sous la direction de maîtres comme Marmontel. Il devient rapidement un pianiste accompli et intègre l’orchestre familial, qui anime les bals de la cour impériale sous Napoléon III.
La consécration grâce au prince de Galles
Malgré un talent évident, la carrière de Waldteufel peine à décoller jusqu’en 1874, lorsqu’un heureux hasard va changer son destin. Lors d’une soirée à la cour impériale, il est remarqué par le prince de Galles, futur Édouard VII. Séduit par sa musique, le prince recommande Waldteufel à la reine Victoria et à la haute société britannique. Dès lors, il signe un contrat d’édition avec le célèbre éditeur Charles Boosey, et ses valses commencent à conquérir l’Europe.
Parmi ses œuvres les plus célèbres, la valse Les Patineurs (1882) reste sans doute la plus emblématique. Inspirée du patinage sur glace, elle évoque avec légèreté et fluidité les glissements et pirouettes des danseurs sur une patinoire hivernale. Son style, reconnaissable entre mille, mêle élégance, lyrisme et une orchestration subtile qui rivalise avec les chefs-d’œuvre de Johann Strauss fils.

Un style unique entre tradition et modernité
Si Waldteufel est souvent comparé aux Strauss, il a su développer une esthétique propre. Là où Johann Strauss fils privilégie des orchestrations fastueuses et pleines de panache, Waldteufel se distingue par une douceur et une finesse mélodique particulières. Ses compositions sont imprégnées d’un charme français, entre raffinement aristocratique et délicatesse romantique.
Outre Les Patineurs, il compose de nombreuses autres valses à succès : España (1886), inspirée d’un air espagnol populaire, ou encore Estudiantina (1883), qui capture l’atmosphère enjouée des fêtes étudiantes. Son catalogue comprend également des polkas, des mazurkas et des marches, toutes empreintes d’une légèreté qui fait la joie des danseurs.
Une postérité méconnue mais vivace
À la fin du XIXe siècle, avec l’évolution des goûts musicaux et la montée des nouvelles tendances symphoniques et impressionnistes, la musique de Waldteufel tombe peu à peu en désuétude. Après sa retraite en 1899, il mène une vie discrète et s’éteint en 1915 à Paris, dans un relatif oubli.
Aujourd’hui, son œuvre connaît un regain d’intérêt, notamment grâce aux orchestres spécialisés dans la musique légère et aux enregistrements qui permettent de redécouvrir son art. En Alsace, sa mémoire demeure vivante et certains concerts lui rendent hommage, célébrant l’un des plus grands ambassadeurs de la valse française.
Une valse éternelle
Émile Waldteufel fut un véritable artisan du bonheur musical, capable de transporter ses auditeurs dans un tourbillon de grâce et d’élégance. Ses compositions continuent de faire rêver et de faire danser, rappelant que la valse n’est pas seulement une musique du passé, mais une tradition vivante, intemporelle.
En ce jour de commémoration, écoutons ses œuvres et laissons-nous emporter par la magie de ses mélodies. Car si Émile Waldteufel s’est éteint il y a 110 ans, sa musique, elle, danse encore. Et si vous êtes de passage vers Grande rue n’hésitez pas à aller jeter un oeil à la plaque du compositeur!
